H.M. The Queen’s speech at the State Banquet

H.M. The Queen’s speech at the State Banquet on 28 August 2018 at Christiansborg Palace on the occasion of the State Visit from France.

Photo: Kongehuset ©

Monsieur le Président de la République, chère Madame,   

C’est avec beaucoup de joie que je vous souhaite aujourd’hui la bienvenue au Danemark. La France est une amie proche et une alliée de notre pays, c’est pourquoi je me réjouis de votre visite. Je sais à quel point le Prince Henri aurait aussi aimé vous montrer ce pays qui était devenu le sien.

Ma mère, la reine Ingrid, insista pour que mes sœurs et moi-même apprenions le français. J’ai ainsi passé quelques mois enrichissants à Paris en 1963. Ce séjour linguistique revêtit une importance particulière, car lorsque j’ai rencontré, à Londres, mon futur mari, le diplomate Henri de Monpezat, je parlai français. Par la suite, le Prince insista naturellement pour que nos fils apprennent le français dès leur plus jeune âge, et il contribua tout au long de sa vie à promouvoir la culture et la langue française. C’est avec plaisir et fierté qu’il aurait reçu, à mes côtés, le couple présidentiel français.

Monsieur le Président,  

La France nous a toujours attirés, nous les Danois. Les Vikings s’installèrent – à leur façon – en Normandie au neuvième siècle. Beaucoup devinrent rapidement Français. Au douzième siècle, Absalon, un jeune ecclésiastique danois, vint étudier à Paris. Absalon était un ami d’enfance du roi Valdemar et son proche collaborateur. Il fut le fondateur de Copenhague, et construisit son château-fort à l’emplacement même où nous nous trouvons ce soir. 

Depuis vos fenêtres à Amalienborg, vous avez pu admirer, ornant la place, l’exceptionnelle statue équestre de Frederik V, oeuvre du sculpteur français Saly qui fut le premier directeur de l’Académie Royale des Beaux-Arts du Danemark.

Depuis le 17ième siècle, la culture française a été un modèle et une source d’inspiration incontournable pour les arts et les lettres au Danemark. Pendant des générations, la peinture et la littérature danoises ont été profondément influencées par l’esprit français. Le savoir-vivre français, l’élégance, la vision artistique et intellectuelle, ainsi que l’inébranlable volonté de renouveau ont été - et sont toujours - une grande source d’inspiration.

Pendant longtemps, l’inspiration provenait surtout de la France. Cependant, ces dernières années j’ai pu constater avec plaisir que de nombreux Français s’intéressaient aux pays nordiques.  Je n’ai aucun doute que le grand intérêt que le Prince Henri portait à l’art culinaire y est pour quelque chose. Dès les années 1970, des chefs français se sont installés à Copenhague et y ont fortement influencé la gastronomie. Aujourd’hui l’influence est réciproque: la nouvelle cuisine nordique est devenue un concept international dont s’inspirent beaucoup de jeunes chefs, y compris des Français.

Sur le plan artistique, il y a de nombreux exemples d’échanges.  Nous nous trouvons actuellement entouré par une oeuvre exceptionnelle,  fruit de la collaboration entre l´artiste danois Bjørn Nørgaard et la Manufacture des Gobelins.

Ces tapisseries étaient un cadeau pour mes 50 ans. C’est grâce à la bonne volonté de la partie officielle française que cette oeuvre a vu le jour, après 10 ans de travail.

Maintenant, après plus de 15 ans, cette coopération va porter de nouveaux fruits. Quatre de nos meilleurs peintres travaillent de concert avec des artisans français chevronnés à la création de nouveaux gobelins pour l’ancien château royal, Koldinghus, au Jutland.  Nous avons hâte de voir le résultat.

Un même intérêt a été accordé à Søren Kirkegaard dont les manuscrits originaux vous ont été présentés ce matin à la Bibliothèque Royale. On cite souvent sa fiancée, Régine Olsen, qui aurait dit que les Français ne le comprendront jamais. Elle se trompait. La France comprend notre illustre philosophe à sa façon.

De surcroît, Kierkegaard est maintenant représenté dans la bibliothèque de la Pléiade en bonne compagnie entre Kant et Kundera.

Monsieur le Président, 

Les relations franco-danoises ont toujours été bonnes. Nos pays n’ont jamais été en guerre. Un fait rare en Europe.  

Nous avons, par moment, été considérés comme des membres éloignés de cette famille européenne, mais beaucoup de choses nous unissent, dans le passé comme dans le présent.

Nos pays aspirent à bâtir un avenir meilleur. Nous sommes ambitieux sans être naïfs.

Simone Weil a dit : «  La richesse de l’Europe est sa diversité. Sa force est son unité. »

Nous partageons cette opinion. Le monde est en plein changement. L’ordre international et le multilatéralisme qui ont aidé nos deux pays sont menacés.

Face à cette situation, les alliances solides sont essentielles.

Nous sommes très liés dans notre coopération européenne. Et nous dépendons l’un de l’autre pour atteindre les buts que nous nous fixons.

Nous sommes solidaires dans la défense d’une société ouverte. Pour la liberté.

Nos soldats se retrouvent souvent dans les opérations internationales pour éviter les conflits et contribuer à la paix et à la stabilité. Nous commémorons ensemble les victimes de notre engagement commun.

Nous sommes également de proches alliés dans l’aide au développement. Nous accordons beaucoup d’importance à l’éducation. Nous savons qu’il est essentiel de créer un avenir meilleur pour les générations à venir  - à l’étranger, comme chez nous. Ensemble nous défendons les principes fondamentaux de l’État de droit qui accordent des droits à chaque individu.

Le changement climatique et le développement durable sont aussi nos priorités. Nous pouvons nous inspirer mutuellement pour innover dans les domaines de la production et de l’utilisation de l’énergie durable.  La France porte brillamment le flambeau des accords de Paris, et le Danemark a la ferme intention d’obtenir des résultats concrets. Nos deux pays se sont engagés afin de transformer les mots en actions. 

Monsieur le Président,  

La France a été et continue d’être une grande source d’inspiration pour le Danemark et les Danois. Elle a laissé beaucoup d’empreintes. Mais bien sûr, nous sommes différents. L’important est de préserver notre curiosité et de comprendre nos différences.  Cela contribue à  l’enrichissement mutuel de notre relation. 

Nous suivons avec grand intérêt vos efforts pour réformer la société française et sommes flattés de l’intérêt que vous portez au modèle danois dans divers domaines. De la même façon, nous devons continuer de puiser notre inspiration dans les richesses propres à la France. J’éspère que cette visite sera l’occasion de renforcer les relations franco-danoises, qui ont rarement été aussi bonnes et aussi proches.

Grâce à mon mariage, j’ai eu l’occasion de me familiariser avec une région de France, la vallée du Lot, aux alentours de Cahors, région qui a vu grandir mon mari. Tous les deux, il y a plus de 40 ans, nous avons été séduits par le Château de Cayx, un havre de paix, situé à proximité de sa famille. C’est là que j’ai appris à connaître la France profonde, ses beaux paysages, sa gastronomie et ses vins exquis.

Je m’y sens toujours chez moi.

Je lève maintenant mon verre pour exprimer mes vœux de bonheur et de réussite au peuple français, à vous, Monsieur le Président,  et à votre épouse.